Moi, je
déteste le foot et d’ailleurs, je déteste la gym, l’éducation physique et
sportive, comme ils disent, j’ai ça en horreur, me déshabiller dans les
vestiaires avec mes camarades de classe, c’est pas du tout mon truc, j’ai
honte, je ne sais pas de quoi, j’ai l’impression que tout le monde me regarde,
qu’on va se moquer de moi et quand le ballon arrive, j’en ai la nausée. Un jour,
ils m’ont mis gardien de but, ça a été une catastrophe, la Passoire, ce nom m’est
resté longtemps. Même Jules, mon copain, il ne peut rien pour moi, il est le
premier, lui, à courir derrière le ballon quand je m’essouffle dès les premiers
mètres, trop gros, trop gras, j’ai retiré la photo que maman avait mis dans l’album
où on me voit assis sur la plage, trop gros, trop gras, trop laid, elle a dit
que c’était bizarre, qu’il manquait une photo, c’est moi qui l’a jetée à la
poubelle après l’avoir déchirée en tout petits morceaux. Et je compte les minutes
qui me séparent du moment où la cloche va me délivrer et peut-être que je n’aurais
pas cette fois-ci à monter à la corde lisse, je n’ai jamais su le faire, et
entendre les moqueries car je ne vais pas plus haut qu’un mètre, j’ai le
vertige, heureusement, dans un mois, c’est les vacances.
L’été est
passé et rien n’est plus comme avant. Au pied des marches qui descendent des
salles du labo de physique, Jules m’attend. Il a encore grandi comme une perche
et moi aussi, à côté, j’ai grandi, du moins paraît-il. « Viens, me
dit-il, on va au Balto faire un flipper.
Mais il y a
EPS ?
Et alors ?
Une partie de flipper, c’est mieux, non ? On va quand même pas aller jouer
au foot, non ? c’est nul. »
C’est depuis
ce jour que j’ai commencé à aimer le foot.