vendredi 27 novembre 2015

[Semaine 31] : L’affaire Cathy Williams (quatre).



Transcription d la cassette de l’appareil répondeur-enregistreur retrouvé  au domicile de Mr Peter Chowder, à la suite d’une perquisition réalisée le xxxx, sur commission rogatoire du procureur Dahan, du district de Davenport, Iowa.

Message d’accueil
Bonjour, vous êtes chez Jenny et Pete. Soyez sympas, laissez votre message après le bip. A bientôt.

Message enregistré n°1. Vendredi xxxx, 3:12 pm
Hi Mum, c’est Kate. Je passe chez Doris tout à l’heure après les cours. J’arriverai vers 6 heures.

Message enregistré n°2. Vendredi xxxx, 3:54 pm
Salut chérie. Est-ce que t’as pensé à prévenir George pour vendredi ? Il m’a appelé tout à l’heure et il avait pas l’air très au courant. C’est sympa. Allez, à tout à l’heure.

Message enregistré n°3. Vendredi xxxx, 5:23 pm
Jenny, il m’arrive un truc incroyable. Ecoute, tu vas pas me croire, mais j’ai reçu un email de Cathy. Tu te rappelle Cathy ? Eh bien, elle m’a écrit. C’est juste dingue. On est en train d’échanger. Je t’en dirai plus tout à l’heure.

Message enregistré n°4. Vendredi xxxx, 5:34 pm
Jenny, Cathy m’a dit d’aller à l’université. Tu te rappelles dans les cuisines. Ouais, sans rancune, elle m’a dit, comme ça. Ecoute, on se donne rendez-vous sur place. Dépêche-toi, à 6:15. A toute.

Message enregistré n°5. Vendredi xxxx, 6:42 pm

Jenny, help. Ecoute, je veux pas t’affoler, mais viens vite. J’étouffe. Il fait tout noir. J’ai du mal à respirer. [silence]. Jenny, j’ai peur.

jeudi 26 novembre 2015

[Semaine 30] : L’affaire Cathy Williams (trois).

Article paru dans l’Iowa Evening Post

Le Mystère de la Chambre Froide.

De notre envoyé spécial à Davenport

Suicide ou meurtre déguisé ? Trois jours après la découverte du corps sans vie de Peter Chowder dans la chambre froide des cuisines de la Queens University, le mystère reste entier.


Le capitaine O’Brian se serait bien passé d’une telle publicité. Dans ses bureaux  dont les fenêtres s’ouvrent sur la très bucolique campagne du lac Panker, il vient de relire le rapport d’autopsie le centre médicolégal de Davenport (IA). Un document pour le moins prudent qui, entre assassinat et suicide, ne prend pas partie.  « Pas de déclaration à faire pour l’instant. Nous informerons la presse l’heure venue. »
Ce qui est sûr, et ce que le rapport d’autopsie met en exergue, c’est que Peter Chowder, 56 ans, est  mort d’une crise cardiaque et qu’il a été retrouvé enfermé dans la chambre froide de l’Université. Il a été découvert lundi matin par l’équipe de cuisine au moment où elle prenait ses quartiers de la semaine. A en croire les premières constatations, Mr Chowder était décédé trois jours plus tôt, soit vendredi soir, alors que les employés étaient déjà partis pour le week-end. Comment a-t-il pu s’introduire dans les locaux de l’université, placés sous alarme, et comment est-il rentré dans la chambre froide, fermée par un cadenas, la question est posée et la police est loin d’en avoir trouvé la réponse.

La foire aux rumeurs


Dans cette petite ville de l’Iowa, plus connue pour son festival de country music que pour ses faits divers, les rumeurs vont bon train. Suicide déguisé, meurtre rituel, intervention divine ou même extraterrestre, les hypothèses les plus fantaisistes se succèdent au bar du pub local. « Il faut laisser la police faire son travail, déclare le capitaine O’Brian à qui veut l’entendre. Nous fouillons le passé de Mr Chowder, nous interrogeons son épouse, les rodeurs, rien n’est laissé au hasard. Nous demandons aux habitants de Davenport d’être patients et de garder leur sang froid. »
Les hautes fenêtres néo-tudoriennes de la Queens University de Davenport risquent donc de cacher encore longtemps le secret de Peter Chowder. Que venait-il chercher dans cette chambre froide ? Comment a-t-il pu s’introduire sans déclencher la sécurité ? L’enquête le dira sans doute bientôt. Mais il se murmure, au-delà des lourds murs de brique, que ce n’est pas la première fois que l’université abrite des drames et que le lieu est maudit : vexations, violences, décès suspects, les exemples sont nombreux de faits divers qui ont tourné au tragique. C’est le cas de l’affaire Cathy Williams, une étudiante de l’université qui, en 1981, avait été retrouvée étouffée suite à une séance de bizutage qui avait mal tourné. La police avait, à l’époque, conclu à un accident. Deux jours après avoir été retrouvé, le corps avait mystérieusement disparu. L’affaire avait été classée mais le cas était resté suspect : la Queens University serait-elle hantée ? Les vents du lac Panker qui descendent des montagnes voisines ont la réputation de rendre fou et ils n’ont pas fini de souffler dans les longs couloirs de l’université.

 < à suivre >

mercredi 25 novembre 2015

[Semaine 29] : L’affaire Cathy Williams (deux).

De : cat@queensuniversity.org
A : pete@queensuniversity.org
Objet : T’es où ?

Alors, vous venez, ou quoi ?

De : pete@queensuniversity.org
A : cat@queensuniversity.org
Objet : RE: T’es où ?

Cathy, c’est toi ?

De : cat@queensuniversity.org
A : pete@queensuniversity.org
Objet : RE: T’es où ?

Oui, idiot. Qui veux-tu que ce soit ?

De : pete@queensuniversity.org
A : cat@queensuniversity.org
Objet : RE: T’es où ?

Dingue ! Depuis tout ce temps !

De : cat@queensuniversity.org
A : pete@queensuniversity.org
Objet : RE: T’es où ?

Comme tu dis. Alors, tu viens m’ouvrir ou quoi ? Si tu crois que ça m’amuse, vos blagues d’ado attardé.

De : pete@queensuniversity.org
A : cat@queensuniversity.org
Objet : RE: T’es où ?

C’est incroyable de te savoir là, après toutes ces années.

De : cat@queensuniversity.org
A : pete@queensuniversity.org
Objet : RE: T’es où ?

Je commence à manquer d’air.

De : pete@queensuniversity.org
A : cat@queensuniversity.org
Objet : RE: T’es où ?

Toutes ces années, j’ai souvent pensé à toi, tu sais…

De : cat@queensuniversity.org
A : pete@queensuniversity.org
Objet : RE: T’es où ?

J’étouffe !

De : pete@queensuniversity.org
A : cat@queensuniversity.org
Objet : RE: T’es où ?

T’étais super, vraiment superbe, comme fille. Je ne te l’ai jamais dit, mais c’était super cette nuit qu’on a passé, là. Jamais plus je n’ai revécu cela.

De : cat@queensuniversity.org
A : pete@queensuniversity.org
Objet : RE: T’es où ?

Tu me fais marcher… Respirer.

De : pete@queensuniversity.org
A : cat@queensuniversity.org
Objet : RE: T’es où ?

Mais non, je t’assure, c’est vrai, je t’assure.

De : cat@queensuniversity.org
A : pete@queensuniversity.org
Objet : RE: T’es où ?

Et c’est maintenant que tu me le dis, après ce que tu m’as fait ?

De : pete@queensuniversity.org
A : cat@queensuniversity.org
Objet : RE: T’es où ?

Bon, allez, c’est pour rire ;) Et c’est la tradition.

De : cat@queensuniversity.org
A : pete@queensuniversity.org
Objet : RE: T’es où ?

Moi, je trouve cela débile et pas drôle. Sors-moi de là.

De : cat@queensuniversity.org
A : pete@queensuniversity.org
Objet : RE: T’es où ?

Pete, tu me réponds ou quoi ?

De : cat@queensuniversity.org
A : pete@queensuniversity.org
Objet : RE: T’es où ?

Peter ?

De : pete@queensuniversity.org
A : cat@queensuniversity.org
Objet : RE: T’es où ?

Oui, oui, je suis là. Il fallait que je descende, rapport au boulot.

De : cat@queensuniversity.org
A : pete@queensuniversity.org
Objet : RE: T’es où ?

Mmm… Tu es allé la voir, c’est ça ?

De : pete@queensuniversity.org
A : cat@queensuniversity.org
Objet : RE: T’es où ?

Quoi, ça ?

De : cat@queensuniversity.org
A : pete@queensuniversity.org
Objet : RE: T’es où ?

Cette vieille s… de Jenny.

De : pete@queensuniversity.org
A : cat@queensuniversity.org
Objet : RE: T’es où ?

Allez, arrête. Jenny, c’est ma femme maintenant.

De : cat@queensuniversity.org
A : pete@queensuniversity.org
Objet : RE: T’es où ?

QUOI, JENNY, TA FEMME ? TU TE FOUS DE MOI ?

De : pete@queensuniversity.org
A : cat@queensuniversity.org
Objet : RE: T’es où ?

Mais, Cathy, oui, c’est bien Jenny, ma femme. Et depuis longtemps. Mais, tu sais, je ne t’ai jamais oubliée, Cathy.

De : cat@queensuniversity.org
A : pete@queensuniversity.org
Objet : RE: T’es où ?

J’étouffe.

De : pete@queensuniversity.org
A : cat@queensuniversity.org
Objet : RE: T’es où ?

Cathy ?

De : pete@queensuniversity.org
A : cat@queensuniversity.org
Objet : RE: T’es où ?

Tu es toujours là ?

De : pete@queensuniversity.org
A : cat@queensuniversity.org
Objet : RE: T’es où ?

Cat, répond-moi.

De : pete@queensuniversity.org
A : cat@queensuniversity.org
Objet : RE: T’es où ?

J’arrive.

< à suivre >




mardi 24 novembre 2015

[Semaine 28] : L’affaire Cathy Williams (un).

Monsieur Ordinateur est venu ce matin et m’a promis que tout allait se remettre à fonctionner comme avant. Je vais recevoir tous mes emails, il me l’a promis, comme avant et qu’il n’y aura pas de courriers perdus, ça, il me l’a promis, il fallait juste que les serveurs reboutent et, il me l’a promis, ce sera comme avant.
Pour le coup, j’en ai reçu 542, en dix minutes, le temps que j’aille voir Nicole au Bacofisse, qu’elle me redonne le dossier que je lui avais prêté parce que Julio (Julio, c’est mon chef), m’a demandé de le boucler aujourd’hui, c’est pressé, paraît-il. (Je n’en crois rien, Julio exagère toujours un peu, quand il a besoin de quelque-chose. En fait, je sais qu’il en a besoin pour la semaine prochaine).
Le temps que je remonte de chez Nicole par l’ascenseur et tout, eh bien j’avais 542 nouveaux messages sur ma boîte aux Aoutlouque, 542 messages à trier, lire, répondre plus tard, tout de suite, vite vite, c’est urgent, qu’est-ce que je vais devenir, c’est la kata.
Je les ai classés par date, des plus anciens aux plus récents, comme ça je vais déjà pouvoir me débarrasser des vieux emails vite fait, j’ai pensé, les urgents attendront demain, quand j’aurai fini avec le dossier de Julio.
Le problème c’est que le premier email datait du 15 octobre 1979. Mince, je me suis dit, comment est-ce possible, d’où il vient celui-là ? J’avais 19 ans le 15 octobre 1979. Encore un coup de Monsieur Ordinateur. Lorsque je l’ai appelé, il m’a dit que je me trompais et que, de toute façon, en 1979, les emails n’existaient pas. Jetez-le, ce doit être un spam ou quelque-chose comme cela, danger, jeter, poubelle.
Mais j’ai ouvert l’email, vu que le 15 octobre 1979 était une date que je connaissais bien, celle des 18 ans de Cathy, la belle Cathy, qui trainait tous les mecs de l’université derrière elle et qui, la veille, le 14 octobre 1979 avait disparu.
Alors j’ai ouvert l’email, vu que l’expéditeur était une dénommée Cathy.

Disparu
Elle a disparu
Au coin de ma rue

Cathy, la fille la plus sexy de l’université, Cathy.

Alors j’ai ouvert l’email.


< à suivre >