dimanche 7 décembre 2014

[Fiction 41] : La carte de Paul.

 
« Eh bien, on se verra au soleil, leur avait-il dit. » Paul et sa femme sont venus au soleil, en Andalousie, répondant à son invitation. Des jours de voyage. Ils se sont installés à l’auberge locale, sur le port, ils lui avaient envoyé un petit mot pour le prévenir qu’ils étaient là, la joyeuse bande venue de Paris, incroyable au milieu de ce trou, à mille lieues de leur base. Ils se sont donné rendez-vous au café, et c’est là qu’il a retrouvé son ami Paul. Sa femme, il ne la connaissait pas, ce fut fulgurant lorsqu’il a croisé son regard perçant et sa beauté androgyne. Il l’a invitée à se promener sur les rochers ; il a ramassé un petit bout de bois tortueux qu’il conservera toute sa vie, porte bonheur. Le lendemain, alors qu’ils se baignaient dans une crique, il a voulu l’impressionner et est descendu, nu, le corps enduit de bleu de méthylène que sa sueur sous le soleil faisait couler, aspergeant les rochers, puant la merde de chèvre. Et quand il l’a rejointe dans sa chambre, un panier d’oursins à la main, c’est elle qui étaient nue derrière la porte.
Elle est restée avec lui, le bel andalou, elle, la fille de l’Est qui n’avait rien à faire ici, mais on s’en fout de la famille arriérée, la fulgurance, c’est pour la vie et même au-delà, après la mort, à jamais sur les milliers de toiles dont elle serait l’inspiratrice.
Paul est reparti avec ses amis. Il a envoyé une carte postale de Barcelone à sa femme Gala, une carte qui représente la Sagrada Familia, avec ces simples mots « meilleures pensées ». De son ami Salvador, il n’était pas question.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Merci de votre commentaire. A jeudi prochain sur www.blogetautresnouvelles.com